Artefact métallique en IRM: les solutions
Introduction
Après avoir décrit dans un précédent article intitulé « l’artefact métallique – partie 1 : la formation de l’artefact », nous allons dans ce qui suit décrire les différentes solutions permettant de réduire ces artefacts.
Les solutions
- Retirer tout objet métallique amovible permettra d’éviter toute distorsion de champ due à ces objets
- Travailler à bas champ. L’aimantation (M) du métal présent dans le champ principal B0 dépend, entre autres comme déjà expliqué, de sa susceptibilité magnétique (X) (= capacité de la matière à s’aimanter en présence d’un champ magnétique) et de l’intensité de B0 (H)
Avec :
- M = aimantation du métal
- X = susceptibilité magnétique du métal
- H = induction magnétique en Tesla (T)
On distingue 3 comportements magnétiques différents qui dépendent de la susceptibilité magnétique du métal : les métaux ferromagnétiques, paramagnétiques ou diamagnétiques.
Plus l’aimantation du métal sera importante plus les distorsions de champ principal B0 (donc ses hétérogénéités) seront grandes et donc l’artefact métallique important.
- Faire un shim actif manuel permet d’affiner l’homogénéité du champ magnétique B0 grâce à des bobines supraconductrices. Des courants électriques constants sont appliqués dans ces bobines de shim pour produire un champ magnétique correctif qui permet l’obtention d’un champ magnétique plus homogène (fig 1)
La présence d’un patient installé dans l’IRM viendra naturellement perturber « l’homogénéité » de B0 qui peut être compensée par l’étape de shim automatique fait durant la calibration d’une séquence. La présence de métal entraînera, comme précédemment expliqué, une augmentation de ces hétérogénéités. Un shim actif manuel localisé peut limiter ce phénomène, de manière plus ou moins pertinente, suivant la susceptibilité magnétique du métal.
Fig 1. Principe du shim actif. L’application d’un shim actif permet d’opposer un champ magnétique au champ magnétique B0 et ce afin de le rendre moins hétérogène en présence de métal.
- Privilégier les séquences en écho de spin. La présence des impulsions de rephasage à 180° permet de s’affranchir des déphasages dus aux hétérogénéités du champ principal B0 (*) et donc de limiter la perte de signal due à la présence de métal (fig 2)
Fig 2. Séquence écho de spin vs séquence écho de gradient. Artefact métallique dû à des bagues dentaires. L’artefact est diminué sur la coupe réalisée en écho de spin T2 (b) en raison des nombreuses impulsions RF de rephasage comprises dans la séquence par apport à la séquence réalisé en écho de gradient T2* (a).
- Augmenter le facteur turbo en écho de spin rapide. Les hétérogénéités, comme expliqué précédemment augmentent, de façon plus ou moins importante, avec la présence de métal ferromagnétique, paramagnétique ou diamagnétique. Augmenter le facteur turbo permettra d’augmenter le nombre d’impulsions de rephasage à 180° comprises dans la séquence ; ces impulsions permettant de s’affranchir des déphasages dus aux hétérogénéités de champ. L’artefact métallique s’en trouvera diminué (fig 3)
Fig 3. Artefact métallique et facteur turbo en écho de spin rapide. Artefact métallique dû à un matériel d’ostéosynthèse sur la coupe en écho de spin T1 (a). L’artefact est diminué sur la coupe en écho de spin T2 en raison des nombreuses impulsions de rephasage appliquée dans la séquence (b).
- Diminuer le temps d’écho (TE). Le TE correspond au temps de la relaxation transversale responsable des déphasages des noyaux d’hydrogène. Comme expliqué dans l’article intitulé « l’artefact métallique – partie 1 : la formation de l’artefact », cette relaxation est responsable de la décroissance du signal. Cette décroissance étant accélérée par la perturbation du champ due à la présence de métal, la réduction du TE permettra de limiter ce phénomène (fig 4)
Fig 4. Artefact métallique et diminution du TE. L’artefact au niveau des yeux est plus important avec un TE de 60 ms (a). IL diminue lorsque l’on baisse le TE à 30 ms (b).
- Diminuer le volume du voxel qui est déterminé par le champ de vue (FOV), la taille de la matrice et l’épaisseur de coupe. Le déphasage des noyaux d’hydrogène est lié à leur rapport gyromagnétique, à la variation de champ (gradient) intrinsèque au tissu (dû à sa susceptibilité et au métal si présent), à la taille du voxel et au TE par la relation.
Avec :
- ∆Ф = déphasage des noyaux d’hydrogène
- γ = rapport gyromagnétique nucléaire qui ne dépend que du noyau atomique considéré
- Gi = gradient intrinsèque au tissu
- dvx = taille du voxel
- TE = temps d’écho
Diminuer la taille du voxel permettra de limiter l’influence des variations de champ magnétique dues au métal à l’intérieur de celui-ci. Cela entrainera une diminution de la relaxation transversale et donc de la perte du signal (fig 5 et 6 et 7).
Fig 5. Artefact métallique et diminution de la taille du voxel.la présence de métal entraîne une variation de champ Un pixel (carré jaune) de grande taille subit énormément la variation de champ (double flèche noire) créée par la présence de métal (a). La diminution de la taille du pixel permet de limiter l’influence de cette variation à l’intérieur de celui-ci (b). Il en sera de même en modifiant l’épaisseur de coupe.
Fig 6. Artefact métallique et diminution de la taille du pixel. (a) Artefact métallique dû à un implant dentaire (ovale blanc) sur la coupe en T2* avec une résolution de 1.12*0.9*4mm. (b) L’artefact diminue sur la coupe en T2* avec une résolution de 0.6*0.6*4mm.
Fig 7. Artefact métallique et diminution de la taille de l’épaisseur de coupe. L’artefact métallique dû à un appareil dentaire est majoré sur la coupe en T2* de 6mm (a) par rapport à la même coupe réalisée en 1.5mm (b).
- Augmenter la largeur de la bande passante. Le signal de l’écho est un signal composite c’est-à-dire qu’il est constitué de fréquences et de phases différentes (dues à l’application du codage de phase et de celui en fréquence pour la localisation spatiale du signal)
La bande passante correspond à l’ensemble des différentes fréquences contenues dans le signal. Elle dépend du nombre d’échantillonnage dans le sens de la fréquence (matrice dans ce sens) et du temps lecture (temps nécessaire à la réception du signal).
BP = Nx/TO
Avec :
- BP = Bande passante à la réception du signal
- Nx = nombre d’échantillonnage dans le sens de la fréquence
- TO = temps de lecture
En pratique, le temps séparant chaque écho dépend de la largeur de la bande passante (fig 8). Une augmentation de la largeur de la bande passante permettra un temps de lecture plus court ce qui conduira à une réduction de l’espace inter-écho, donc du TE de chaque écho d’où une diminution de l’artefact (fig 9 et 10).
Fig 8. Principe de la bande passante. En fonction du choix de la largeur de la bande passante, le temps de lecture de chaque écho sera plus ou moins long ce qui conduira à une réduction ou une augmentation de l’espace inter-écho (double flèche noire) et donc du TE de chaque écho (double flèche rouge).
Fig 9. Bande passante et décroissance du signal. Un élargissement de la bande passante conduira à une réduction de l’espace inter-écho (flèche en pointillé bleu) d’où un décalage de chaque écho vers le début la séquence -impulsion à 90°- (flèche rouge) ce qui conduira à une réduction du TE de chaque écho (double flèche noire). Ce processus amènera à une décroissance du signal moins importante (f(T2)). Ce principe permet de limiter l’artefact métallique. Remarque les impulsions à 180° s’appliquant à TE/2, elles seront aussi décalées vers le début de la séquence (flèche jaune).
Fig 10. Bande passante et artefact métallique. L’artefact métallique est dû à la présence d’implants dentaires. Il provoque une mauvaise visualisation du sinus maxillaire droit sur la coupe en axial T2 réalisée avec une bande passante de 100 Hz/Pixel (a). L’augmentation de largeur de la bande passante à 400 Hz/Pixel sur la coupe axial T2 (b) permet de limiter cet artefact et faire apparaitre le sinus maxillaire.
- Utilisation de l’imagerie parallèle. Les techniques « d’imagerie parallèle » aussi appelées techniques « d’acquisition parallèle » (SENSE chez Philips, GRAPPA chez Siemens, ASSET chez GE, SPEEDER chez Canon…) permettent une diminution du temps d’acquisition en IRM par réduction du nombre de lignes de la matrice dans le sens de la phase (= nombre d’écho de signal recueilli)
Comme dit précédemment le signal des échos est un signal composite constitué de différentes phases et fréquences des noyaux d’hydrogène. Ces différences de phase et de fréquence au sein des échos recueillis permettront de localiser spatialement ces noyaux d’hydrogène au sein de l’image.
La présence de métal va créer des erreurs d’encodage (coordonnée en x’ au lieu de x voire « l’artefact métallique – partie 1 : la formation de l’artefact ») au sein des différents échos obtenus. L’imagerie parallèle, permettant de réduire le nombre d’écho recueilli donc le nombre d’erreur d’encodage des noyaux d’hydrogène, aura pour effet de réduire les artefacts métalliques après reconstruction de l’image.
- Inverser la direction du codage de phase et celle de la fréquence peut permettre de modifier la forme de l’artefact sans le supprimer
- Privilégier les techniques de saturation de graisse peu sensibles aux hétérogénéités de champ type STIR, DIXON, aux techniques de saturation spectrale (exemple : SPIR, SPAIR…) qui elles sont très sensibles à ces inhomogénéités (fig 11)
Fig 11. Artefact métallique et technique de saturation de graisse – (a) La technique de saturation de graisse en SPAIR en fortement perturbée par la présence de métal ce qui entraine une mauvaise élimination du signal de la graisse notamment en dessous de la gaine du nerf optique, proche des mandibules…). (b) L’utilisation d’une séquence STIR permet d’éviter ce phénomène.
- Techniques propres aux constructeurs pour ce genre d’artefact type WARP-SEMAC-VAT (Siemens), MAVRIC-SL (GE), O-MAR (philips), MAR (CANON), HIMAR (HITACHI)
Ces techniques utilisent, entre autres, le VAT (View Angle Title), couplé à un élargissement de la bande passante à l’excitation (BW de l’onde RF) qui permet à un maximum de noyaux d’hydrogène de rentrer en résonnance malgré les distorsions de champ provoquées par la présence de métal.
Comme expliqué dans l’article intitulé « l’artefact métallique – partie 1 : la formation de l’artefact », les artefacts métalliques provoquent des distorsions de champ entrainant, à la fois dans le sens de la lecture et dans le sens de la sélection de la tranche, des erreurs d’encodage.
Le VAT consiste à appliquer un gradient supplémentaire pendant la lecture du signal (= en même temps que le gradient de fréquence) dans la direction de la coupe, d’une amplitude égale à celle utilisée pendant l’application du gradient de sélection de coupe (Gz) durant l’impulsion RF. Les distorsions de l’image (= décalage de pixel), dans le sens de l’application du gradient de fréquence, s’annulent, alors, complètement.
Bien qu’elle corrige les décalages de pixel, la méthode VAT produit un flou de l’image dû à la « projection oblique » du signal (fig 12). Cet effet peut être minimisé en utilisant des épaisseurs de coupe plus fines, une matrice plus élevée et des largeurs de bande passante plus importantes.
Fig 12. Principe du VAT – (a) absence de distorsions de B0 = absence de décalage des tissus (A, B, C) – L’application du codage en fréquence permet de donner des coordonnées en fréquence (x) aux noyaux d’hydrogène suivant leur position dans B0.
(b) La présence de métal va perturber la linéarité du gradient de codage de fréquence localement ce qui entraine une erreur de leur localisation à la reconstruction de l’image d’où un décalage de pixel dans l’image (flèche noire) responsable d’un vide de signal et d’un hypersignal dans l’image finale.
(c) l’application du VAT en même temps que le gradient de codage en fréquence (Gx) permet « d’obliquer » ce gradient (= gradient de fréquence réel) ce qui a pour effet d’annuler les décalages de pixel (cercle rouge) mais avec, là où il y a des zones de superposition des tissus et en bord d’image (cercles jaune), un flou d’image dû à une déformation des pixels (trait plein noir).
La technique SEMAC et la technique MAVRIC consistent à lutter contre les distorsions des profils de coupe.
La technique MAVRIC utilise une approche spectrale. Cela permet d’exciter la tranche, subissant les distorsions de champ par la présence de métal (= perturbation des fréquences de résonnance des noyaux d’hydrogène contenus dans la coupe), par l’application successive d’ondes RF à largeur de bande passante étroite. Cela a pour conséquence l’obtention de plusieurs images d’une même coupe. La coupe finale est obtenue par la combinaison de ces différentes images, ce qui limite les distorsions dans ce sens.
La technique SEMAC utilise un encodage de phase dans la direction de la coupe permettant la localisation des noyaux d’hydrogène dans cette direction afin de limiter les distorsions suivant cet axe.
Conclusion
Les solutions permettant de limiter l’artefact métallique sont multiples et demandent un minimum de compréhension pour les appliquer à bon escient. De façon à lutter le plus efficacement possible contre ce type d’artefact, il sera nécessaire d’utiliser en même temps un maximum des solutions citées dans cet article.
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