Artefact métallique en IRM: la formation
Introduction
La présence d’artefacts métalliques en IRM est reconnaissable sur l’image par la survenue d’images typiques rendant difficilement exploitable les coupes à proximité de métal. Bien que ces artefacts soient identifiables sans difficulté majeure, l’artefact métallique, de par sa formation, peut être à l’origine de fausses images pathologiques pouvant entrainer des difficultés d’analyse des images.
Origine
L’artefact métallique est dû à la présence de matériels ferromagnétiques (capacité de la matière à s’aimanter fortement en présence d’un champ magnétique externe. À l’arrêt de celui-ci, l’aimantation subsiste en partie – par exemple l’acier inoxydable ferritique), paramagnétiques (capacité de la matière à s’aimanter très faiblement en présence d’un champ magnétique externe. À l’arrêt de celui-ci, l’aimantation de la matière disparaît immédiatement – par exemple le titane) ou diamagnétique (capacité de la matière soumis à un champ magnétique, à créer une très faible aimantation opposée à ce champ, et donc à engendrer un champ magnétique opposé au champ extérieur– par exemple le cuivre) dans le champ principal B0 qui va provoquer des distorsions locales de ce champ.
Cela a pour conséquence, sur l’image obtenue, une zone vide de signal avec un hypersignal périphérique et une distorsion géométrique de l’image dans le sens du codage en fréquence et dans le sens de la coupe. L’hypersignal périphérique et la distorsion de l’image sont dus à une erreur de localisation spatiale du signal (= déplacement chimique) (fig 1).
Fig 1. Artefact métallique.(1) (a) zone de vide de signal, (b) hypersignal périphérique dans le sens du codage en fréquence, (c) distorsion géométrique de l’image. (2) reconstruction MPR sagittale à partir d’une acquisition en 2D de coupes de 3mm d’épaisseur montrant l’hypersignal et la distorsion de l’image se propageant aussi dans le sens de la tranche (« effet de courbure » = pointe de flèche rouge).
Artefact métallique: comment?
En IRM la fréquence de Larmor (Fo) de précession des noyaux d’hydrogène est proportionnelle au champ magnétique principal B0.
Fo = γB/2π
Avec :
- γ = rapport gyromagnétique nucléaire qui ne dépend que du noyau atomique considéré
- B = Bo (aimant de la machine) + dB où dB représente les hétérogénéités locales propre au champ B0
- B = Bo (aimant de la machine) + dB où dB représente les hétérogénéités locales propre au champ B0
En IRM pour qu’il y ait excitation, il faut que la fréquence de l’onde radiofréquence, également appelé champ électromagnétique B1 (FondeRF ou FB1), soit à la même fréquence que les noyaux d’hydrogène (= principe de résonnance). Soit :
FondeRF = FLarmor = γB/2π
Les métaux ont des susceptibilités magnétiques (capacité de la matière à s’aimanter en présence d’un champ magnétique externe) intrinsèques élevées qui produisent des distorsions du champ magnétique principal B0 (l’acier inoxydable type ferritique ou martensitique provoquera une distorsion plus importante que l’alliage de titane par exemple) (fig 2). Cela augmente de façon importante les variations locales de B0 (dB) avec pour conséquence des modifications de la fréquence de Larmor dans le plan de coupe et à travers le plan de coupe.
Les variations du champ B0, provoquées par la présence de métal, dépendent de la susceptibilité magnétique, de la taille, la géométrie, la masse du métal et son orientation par rapport à B0 ainsi que de l’intensité de celui-ci. La perturbation de la fréquence de Larmor qui en découle entrainera une mauvaise excitation (impossibilité pour l’onde RF d’entrer en résonnance avec les noyaux d’hydrogène là où B0 est fortement perturbé) d’où la présence de vide de signal (fig 3).
Fig 2. Métal et distorsion de B0. (a) De base le champ B0 est relativement homogène (présence d’hétérogénéités propres à B0), les noyaux d’hydrogène précessent à la fréquence de Larmor (Fo). (b) La présence de métal ferromagnétique ou paramagnétique va provoquer des distorsions des lignes de champ de B0, la fréquence de précession (F) des noyaux d’hydrogène s’en trouve perturbée du fait de l’augmentation des variations locales de B0.
Fig 3. Artefact métallique et vide de signal. La présence d’un appareil dentaire perturbe la fréquence de précession des noyaux d’hydrogène. Cela entraine une impossibilité pour l’onde RF d’entrer en résonance avec les noyaux d’hydrogène là où B0 est fortement perturbé d’où la présence d’un vide de signal (a).
En IRM le signal est lu dans le plan transversal. L’aimantation transversale obtenu après excitation (Mxy) décroit suivant une exponentielle de temps appelé T2*. Ce phénomène, appelé relaxation transversale en T2*, est la conséquence d’interactions des noyaux d’hydrogène entre eux responsable de leurs déphasages (vrai T2) plus les déphasages supplémentaires dus aux hétérogénéités de champ principal B0 (). Cette relaxation est responsable de la décroissance du signal.
Comme dit précédemment, la présence de métal va perturber B0 ce qui augmente ses variations locales (dB). Cela a pour conséquence une augmentation du « phénomène * » d’où une accélération de la décroissance de l’aimantation transversal en T2 (fig 4) responsable d’un signal hypo-intense. Cela se traduit à l’image par « un élargissement de la zone vide de signal » (fig 5).
Fig 4. Artefact métallique / accélération de la relaxation transversale en T2* – (a) relaxation transversale en T2* due aux interactions des noyaux d’hydrogène entre eux (vrai T2) plus les déphasages dus aux hétérogénéités de champ propre à B0. (b) la présence de métal va perturber B0 ce qui engendre des hétérogénéités supplémentaires qui augmentent ses variations locales (dB). Cela a pour conséquence une augmentation du « phénomène * » d’où une accélération de la décroissance de l’aimantation transversal en T2*.
Fig 5. Artefact métallique dû à un implant dentaire/ Ax T2* – Zone de vide de signal (a) due à l’absence de résonance (zone b en bleu) et zone de signal hypo intense dû à une accélération de la relaxation T2* du fait des variations locales de B0 provoquant un élargissement de la zone de vide de signal (zone c en jaune).
La reconstruction de l’image en IRM répond aux exigences de la localisation spatiale du signal. Ce sont des gradients de champs magnétiques qui sont utilisés pour le codage spatial en IRM. Les gradients de champs magnétiques modifient de façon linéaire, locale et constante B0. Ils sont au nombre de 3 : gradient de sélection de coupe, de codage de phase et codage en fréquence.
Les règles de localisation spatiale du signal demandent, notamment, une grande linéarité du gradient de codage en fréquence (Gfreq ou Gx). Un gradient de champ magnétique permet d’établir une relation linéaire entre fréquence et position. Ainsi, lorsqu’une impulsion sélective est appliquée en présence de gradient, les propriétés de sélectivité fréquentielle deviennent des propriétés de sélectivité spatiale (fig 6).
Fig 6. Application du gradient de codage en fréquence – le gradient de codage en fréquence (Gx) modifie de façon locale, linéaire et constante B0 ce qui entraine une variation locale et linéaire des fréquences de précession des noyaux d’hydrogène. En même temps que l’application de ce gradient, on recueil le signal. Les fréquences ainsi modifiées permettent de donner des coordonnées en fréquence (x) aux noyaux d’hydrogène suivant leur position dans B0.
- La présence d’un métal, ferromagnétique, paramagnétique ou diamagnétique, va compromettre cette linéarité en provoquant des variations locales de B0 donc des variations locales de fréquence de précession
- Le proton d’hydrogène possédant une position réelle x aura, à proximité du métal, une position x’ due à la distorsion de Bo (∆f), provoqué par ledit métal. Il en résulte une modification de la fréquence de précession non linéaire à cet endroit lors de l’application du codage en fréquence (Gx). Cela entraînera une erreur d’encodage lors de l’application du gradient de lecture d’où une erreur de localisation spatiale à la reconstruction de l’image (fig 7)
Fig 7. Application du gradient de codage en fréquence et présence de métal – (a) le gradient de codage en fréquence (Gx) modifie de façon locale et linéaire B0 ce qui entraine une variation locale et linéaire des fréquences de précession des noyaux d’hydrogène. Les fréquences ainsi modifiées permettent de donner des coordonnées en fréquence (x) aux noyaux d’hydrogène suivant leur position dans B0 (ex : rond bleu caractérise un noyau dont la coordonnée en x correspond à une fréquence de 63,02 MHz). (b) la présence de métal va perturber la linéarité du gradient de codage de fréquence localement (courbe rouge) ce qui entraine une erreur de coordonnée en x’ (x’ = x + variation de fréquence de précession due au métal = 63,01MHz) du noyau d’où une erreur de sa localisation à la reconstruction de l’image (rond jaune = position erronée / rond bleu = position réelle).
Cela se traduit par une distorsion de l’image associée à un artéfact de déplacement chimique, dans le sens de l’application du gradient, entraînant une surbrillance en périphérie. En effet les noyaux d’hydrogène mal encodés se retrouvent localisés dans l’image à un endroit où se trouvent des noyaux eux bien positionnés. On a alors au même endroit, dans l’image, le signal de noyaux justement localisés plus le signal de noyaux ayant une erreur de localisation d’où un hypersignal périphérique (fig 8).
Fig 8. Artefact métallique – distorsion de l’image et hypersignal périphérique. La présence d’un appareil dentaire perturbe la fréquence de précession des noyaux d’hydrogène. Cela entrainera une erreur d’encodage du signal lors de l’application du gradient de codage en fréquence responsable d’une distorsion de l’image (a) – bien visible au niveau des globes occulaires – et d’un hypersignal périphérique dû au signal de noyaux d’hydrogène encodé à un endroit erroné qui se superpose à celui de noyaux justement positionnés (b).
Il en sera de même dans le sens de la sélection des coupes. Les variations de fréquence de précession dans la coupe entraînent une modification du profil d’excitation, lors de l’application du gradient de sélection de coupe, qui aura pour conséquence un déplacement du signal dans le sens de la coupe. Comme la fréquence varie dans l’espace, le signal des noyaux d’hydrogène, dont la fréquence de précession perturbée par la présence de métal mais qui sont rentrés en résonance, peut être déplacé dans le plan de coupe. Cette erreur peut entraîner un décalage de la tranche excitée, ou un « effet de courbure ». Le résultat global est que la région sélectionnée diffère de ce qui était souhaité. Cela entraîne une perte de signal, dans une coupe et un hypersignal dans la coupe sus ou sous-jacentes (fig 9 et 10).
Fig 9. Artefact métallique et perturbation du profil d’excitation. La présence de métal perturbe les fréquences de précession aussi dans le sens de la coupe. L’hypersignal peut aussi provenir du signal noyaux d’hydrogène de coupes sus et sous-jacentes.
Fig 10. Artefact métallique et fausse image pathologique. Hypersignal des espaces sous-arachnoïdiens ainsi que des cornes frontales des ventricules latéraux pouvant faire penser à une hémorragie sous-arachnoïdienne. En analysant les coupes sous-jacentes, on aperçoit la présence d’un artefact métallique responsable de cet hypersignal et qui pourrait entrainer des erreurs d’interprétation.
Conclusion
L’artefact métallique est un artefact majeur en IRM pouvant entrainer des images pathologiques. Bien que peu connu, la compréhension des principes physique de base à la formation de cet artefact est essentiel pour comprendre les solutions que l’on peut y apporter et ce afin de faciliter la lecture des images IRM par le radiologue.
Bibliographie
- Cho Z, Kim D, Kim Y. Total inhomogeneity correction including chemical shifts and susceptibility by view angle tilting. Med Phys 1988; 15:7–11.
- Olsen RV, Munk PL, Lee MJ et al. Metal artifact reduction sequence: early clinical applications. Radiographics 2000; 20:699-712.
- Lu W, Pauly KB, Gold GE, Pauly JM, Hargreaves BA. SEMAC: slice encoding for metal artifact correction in MRI. Magn Reson Med 2009; 62:66–76.
- Koch KM, Lorbiecki JE, Hinks RS, King KF. A multispectral three-dimensional acquisition technique for imaging near metal implants. Magn Reson Med 2009; 61:381–390. (The MAVRIC).
- Hargreaves BA, Worters PW, Pauly KB et al. Metal-induced artifacts in MRI. AJR Am J Roentenol 2011; 197:547-555. (A recent excellent review of metal artifacts and suppression techniques).
- Koch KM, Brau AC, Chen W, et al. Imaging near metal with a MAVRIC-SEMAC hybrid. Magn Reson Med 2011; 65:71-82. (The MAVRIC-SL technique)
- Aboelmagd SM, Malcolm PN, Toms AP. Magnetic Resonance Imaging of Metal Artifact Reduction Sequences in the Assessment of Metal-on-Metal Hip Prostheses. Reports in Medical Imaging 2014;7(1):65-74.
- Talbot BS, Weinberg EP. MR imaging with metal-suppression sequences for evaluation of total joint arthroplasty. RadioGraphics 2016; 36:209-225.
- Dillenseger JP, Molière S, Choquet P, Goetz C, Ehlinger M, Bierry G (2016). An Illustrative review to Understand and Manage Metal-induced Artifacts in Musculoskeletal MRI : a Primer and Updates. Skeletal Radiology, 1-12.
- Hey S, Hoogenraad D, Elanchezhian V, et al. Orthopedic Metal Artifact Reduction (O-MAR): Distortion correction in the presence of a orthopedic implant. Philips White Paper, 2016. (Contains nice diagrams showing how VAT and SEMAC correct for slice distortions)
- Jungman PM, Agten CA, Pfirrmann CW, Sutter R. Advances in MRI around metal. J Magn Reson Imaging 2017; 46:972-991. [DOI LINK]
- Lee EM, Ibrahim E-SH, Dudek N, et al. Improving MR image quality in patients with metallic implants. RadioGraphics 2021; 41: (in press) [DOI LINK] Paper has many practical techniques such as patient positioning and pulse sequence/parameter choice in addition to metal-suppression software.